Accueil
Qui sommes-nous ?
Galerie photos
Récits
Voyages en peintures
Livre d'or
Sites amis
Plan du site
Contactez-nous

Novembre 2004 - Les Tsingy de Bemaraha

 

 

Mardi 26 – Mercredi 27 octobre

Arrivés au petit matin à l’aéroport d’Ivato, le passage en douane n’est vraiment qu’une formalité. En fait, on a l’impression très nette qu’il est beaucoup plus rapide de faire son visa sur place plutôt qu’à l’ambassade à Paris… la logique malgache sans doute !

Josette et Charles viennent nous chercher. Heureusement, car ils ont de nouveau déménagé, et nous serions bien en peine d’indiquer l’adresse à un chauffeur de taxi. Leur nouvelle maison, située en pleine ville, bénéficie d’une agréable petite cour intérieure, à l’abri du bruit et des voitures.

Grandes discussions autour des nouvelles de chacun. Nous allons rflâner au détour des rues. Depuis nos premiers voyages, nous voyons Tana changer progressivement, mais ces changements ne sont souvent que superficiels. Ainsi, les voitures semblent en nettement meilleur état qu’avant, mais on peut vous dire qu’elles polluent toujours autant ! Certains mendiants ont disparu (notamment ceux qui avaient élu domicile – comble de l’horreur – dans le grand tunnel), mais on n’a pas l’impression pour autant que la misère ait reculé. Bien au contraire ! Nous apprendrons au cours de notre voyage que la dévaluation du franc malgache a considérablement appauvri une grande partie de la population.

Mercredi, nous passons à la station de taxis-brousse afin de retenir nos places pour Tsiroanomandidy le lendemain matin. Evidemment, nous tombons sur une embrouille : les places que nous avons achetées dans la cahute de la compagnie s’avèrent non valables. Après quelques âpres discussions, nous faisons comprendre au conducteur que nous ne sommes pas responsables du fait que n’importe qui peut vendre des tickets de sa compagnie à son guichet… A eux de surveiller leurs affaires ! Bref, tout se règle à l’amiable, et nous pourrons embarquer sereinement.

 

Jeudi 28 – Vendredi 29 octobre

Mais où sont passés les vieux taxis-brousse d’antan ? Vous savez, les vieilles 404 bâchées hors d’âge, avec les bancs en bois à l’arrière et les poulets sur le toit ? Nous embarquons dans un mini-bus Toyota (presque) neuf (genre seulement 400.000 km au compteur qui, de toute façon est bloqué depuis fort longtemps), presque déçus de voir que les places attitrées sont respectées : personne sur les genoux, une place raisonnable pour les jambes… bref, le luxe ! La route entre Tana et Tsiroanomandidy est très bonne, et nous filons à une moyenne de 80 km/h. Du jamais vu à Mada ! Le trajet durera à peine 3 h ½.

Notre hôtel est une grande bâtisse coloniale assez décrépie. Mais… il y a une VRAIE douche dans la chambre, et qui fonctionne. Encore une grande nouveauté pour nous à Madagascar ! Un magnifique parquet lustré à l’ancienne se poursuit sur une grande terrasse couverte : ici, tout est fait pour se sentir sous les tropiques. Ne manque que le grand ventilateur au plafond… tant pis, on ne peut pas tout avoir ! Ah, j’oubliais : le prix de la chambre se monte au chiffre astronomique de 35.000 FMG… soit environ 2,75 euros…

Sur le guide, Tsiroanomandidy est célébrée pour son grand marché aux zébus. Le plus grand de tout Madagascar paraît-il. Nous sommes impatients de voir ça ! Hélas, la déception sera grande. Nous ne verrons que quelques troupeaux épars, embarqués (entassés ?) dans d’immenses bétaillères pour être convoyés vers la capitale. Où sont les claquements de fouet promis ? Et la fameuse ambiance Far-West ? Tout ça ne vaut pas ce que nous avions vu il y a quelques années dans le Sud à Ambovombe…

Deux jours à passer à Tsiroanomandidy : ça peut paraître long. En fait, ça donne quelque chose comme : « et si on allait visiter le marché ? » « Et si on allait voir le marché aux zébus ? » « Tiens, on pourrait retourner au marché… » « Tu crois que de nouveaux zébus sont arrivés ? » Une variante de temps en temps : « tiens, on pourrait manger une bricole… » Et puis : « Houlà, déjà 8h, faut aller se coucher ! »

 

Samedi 30 octobre

Aujourd’hui, nous prenons l’avion pour Ankavandra. Mais pas n’importe quel avion : un petit bi-hélices de 19 places, qui se pose (un peu trop vite à mon goût) sur une belle piste en terre à peu près plane. Faut y croire, mais ça marche plutôt bien. On retrouve même un peu de l’ambiance taxi-brousse : une fois entassés dans la carlingue, aucune circulation possible. Les genoux pliés sur le siège de devant, nous n’avons pas le choix : les premiers à rentrer dans l’avion se mettent au fond, et seront les derniers à en ressortir ! Après ça, on a tendance à se sentir solidaire des sardines…

L’arrivée sur la petite piste de brousse a des allures de fêtes. Tout le village est là pour accueillir les visiteurs. Un groupe de femmes, qui est venu accueillir une parente, se met à entonner un magnifique chant d’accueil. Suivent les embrassades, et une mémorable distribution de chapeaux. Voilà donc pourquoi cette dame portait empilés 4 ou 5 chapeaux multicolores sur la tête pendant tout le trajet ! Il faut dire aussi que nous sommes bien accompagnés dans ce voyage : nous avons partagé notre avion entre autres avec un prêtre canadien, qui est curé à Ankavandra depuis 17 ans, et avec un commandant de gendarmerie qui vient enquêter sur un meurtre sordide.

Le village est à 5 km de la piste, et nous sommes bien encombrés avec nos bagages. Pas de problème, le système est bien rodé ici : pas de piste, donc ni taxi, ni pousse-pousse, ni charrette à zébus, mais des porteurs viennent immédiatement nous proposer leurs services. Le Père Jéremy nous indique le tarif officiel : 500 FMG par kilo de bagage. Et nous qui pensions que la pesée des bagages avant l’embarquement était destinée à l’avion ! En réalité, c’est maintenant que nous voyons l’utilité de la petite étiquette Air Madagascar collée sur nos sacs, avec le poids indiqué…

Nous voici donc tous partis en longue procession à travers la savane, les femmes portant leurs paquets sur la tête. Je me retourne parfois pour goûter le spectacle, et j’ai l’impression de me retrouver dans un film de tarzan, avec une véritable expédition coloniale à ma suite…

Le village est une sorte de petit bourg endormi au milieu d’une savane sableuse. Ici, pas de danger, nous sommes les seuls touristes. On vient d’ailleurs nous ouvrir le seul hôtel du coin. Une grande bâtisse pour nous tous seuls… Ici, les nouvelles se répandent vite, et nous avons à peine le temps de poser nos sacs qu’un jeune homme se présente : il est piroguier et a entendu dire que nous souhaitions descendre la rivière. Après une courte discussion autour d’un coca (tiède), nous faisons affaire. Pour 450.000 FMG (environ 40 euros), Davelo se charge de nous emmener jusqu’à Bekopaka en pirogue. Le trajet devrait prendre 3 jours, et nous pouvons partir dès le lendemain matin.

La fin de l’après-midi est occupé par les courses (nourriture pour 3 jours pour nous, et pour 7 jours pour Davelo qui devra remonter la rivière à la perche après notre voyage), et à la visite de la mission du Père Jérémy. Ce dernier est impressionnant. Depuis 17 ans qu’il est là, il a monté toute la mission de ses mains et, aidé des villageois, a bâti une école, et maintenant un couvent pour des sœurs qui devraient arriver d’ici quelques mois. Il joue également le rôle de dispensaire de campagne, et est très fier de nous montrer son grenier à riz. Impressionnant : il faut imaginer une petite maison, remplie du plancher au plafond de riz en vrac. Il y en a des tonnes ! Il nous explique qu’il utilise cette réserve pour inonder le marché local lorsque le cours devient trop élevé pour les habitants, et faire ainsi baisser le prix du riz…

 

Dimanche 31 octobre

En occident, c’est Halloween. Ici, personne n’a entendu parler de cette fête. De toute façon, les malgaches vivent en permanence dans le monde des ancêtres et des morts, alors…

Ce matin, nous partons à l’aube à la rivière, où nous attend notre pirogue ; un simple tronc d’arbre évidé. Humm, pas l’air très stable ce machin ! Heureusement, nous avons dans nos bagages un sac étanche de marin pour y ranger tous nos appareils photos.

Il ne faut pas être gros pour voyager à Mada, on s’en était déjà fait la réflexion. Mais là, comme dit René, au bout de 3 jours, on aura exactement la forme de la pirogue !

Après une courte cérémonie de bénédiction et de prière aux ancêtres (et hop, un peu de rhum dans la rivière, et beaucoup dans le verre des villageois), nous voici partis. La rivière est large et très calme. Elle est surtout d’un rouge très impressionnant. Nous avons l’impression de naviguer sur un fleuve de sang… Oserons-nous nous baigner dedans ? Je ne peux m’empêcher de penser à un disque que nous écoutions beaucoup lorsque nous étions enfants : l’histoire de l’enfant d’éléphant (Kipling), racontée par le toujours génial Robert Lamoureux. Il y était question de crocodiles qui habitent sur les rives du grand fleuve Limpopo, qui est comme de l’huile et tout bordé d’arbres à fièvre. Et bien, on s’y croirait !

La journée se déroule lentement, au fil des paysages de plaine que nous traversons. Nous nous arrêtons pour déjeuner sous un manguier. Le dessert est tout trouvé, il faut juste éviter qu’il ne nous assomme en tombant ! Accablés par la chaleur, nous nous baignons dans l’eau rouge. Bah, de toute façon, au bout de 3 jours, il ne faut pas espérer que les vêtement seront encore propres !

Le soir, nous nous arrêtons pour bivouaquer sur un petit banc de sable juste en face d’un village. Tous les enfants viennent nous voir, en traversant le fleuve dans une vieille pirogue trouée qu’il faut écoper en permanence. Ambiance scout autour du feu de camp. L’un des enfants a apporté une cabosse, cette sorte de guitare artisanale, taillée dans la masse, et qui s’orne d’une sorte de baguette permettant de faire la basse en même temps. René sort son harmonica, et nous avons droit à un mémorable duo.

 

Lundi 1er novembre

La nuit a été excellente. Avant de repartir en pirogue, un petit tour dans le village où nous achetons un canard (vivant, immédiatement baptisé Duffy) et où nous jouons aux « french doctors » en distribuant du doliprane à un gamin fiévreux.

Le temps est lourd, et les muscles endoloris de la veille. C’est avec soulagement que nous nous arrêtons pour le déjeuner. Une petite famille vient immédiatement nous rejoindre (sortie d’on ne sait où, aucun village n’étant en vue), et c’est reparti pour une séance de cabosse/harmonica. C’est lorsque nous voyons les trois enfants se jeter sur nos restes de riz froid que nous comprenons que la vie ne doit pas être simple dans ce coin à l’écart de tout…

Lorsque nous repartons, le temps est menaçant. Une petite pluie nous rafraîchi, mais rien de bien méchant. Lorsque nous nous arrêtons sur un banc de sable pour la nuit, les orages grondent au loin. Je préfererais camper à proximité d’un village, comme la nuit précédente, mais Davelo semble réticent à cette idée. Pendant que notre copain Duffy est en train de vivre ses dernières minutes, nous partons sur cette immense langue de sable à la recherche de combustible. La soirée est tranquille et plutôt fraîche. René est inquiet : les éclairs traversent l’horizon de manière impressionnante. « Es-tu sûr que la rivière ne peut pas monter ? » demande t-il à Davelo. « Impossible », répond ce dernier, manifestement très sûr de lui. Après tout, c’est lui le guide… il est censé connaître parfaitement les dangers locaux ! Epuisés, nous allons nous coucher. A peine entrés dans la tente, l’orage s’abat sur nous avec une violence inouïe. Davelo, qui n’a pas d’abri, vient squatter notre espace vital déjà très réduit. La force du vent est telle que nous devons tenir la tente pour éviter qu’elle ne s’envole. Je pense à nos sacs restés à l’extérieur. Bah, les vêtement seront mouillés, rien de catastrophique. Les appareils photos sont bien à l’abri dans le sac étanche. Bientôt, la tente prend l’eau de tous côtés. C’est sûr, elle est sans doute très bien pour les petites pluies françaises, mais n’est absolument pas conçue pour résister à des orages tropicaux !

Tant bien que mal, trempés, gelés, nous finissons par nous assoupir (Davelo, lui, n’a aucun problème pour ronfler !). L’orage se calme, et laisse la place à une pluie fine qui s’estompe progressivement. Soudain, au milieu de la nuit, j’entend René me dire : « il y a de l’eau sous la tente ! ». C’est vrai, le tapis de sol est mouvant ! D’un bond, je me lève et sors de la tente. La pleine lune éclaire une vaste étendue d’eau, au milieu de laquelle notre tente est plantée. Nous avons de l’eau jusqu’aux chevilles, la tente ne tient plus que par le poids de nos 3 corps (les piquets ont été emportés depuis longtemps), les sacs et la pirogue ont disparus ! Panique à bord ! Première urgence : mettre à l’abri les biens qui nous restent. Nous traînons la tente et les 2/3 affaires qui étaient dedans sur la terre ferme. Puis repartons, l’angoisse au ventre, à la recherche de nos sacs et de la pirogue. Nous voici à une heure du matin, de l’eau jusqu’aux genoux, à essayer de percer la nuit avec nos 2 lampes torches. Sommes-nous encore sur la rive ou déjà dans la rivière ? Il n’y a plus de différence.

Je pense que, sans la pleine lune, nous n’aurions rien retrouvé. Mais il faut croire qu’il y a un dieu pour les touristes inconscients ! Progressivement, nous retrouvons nos sacs. J’entends Davelo crier qu’il a retrouvé la pirogue. Il ne reste plus que le sac étanche, le plus précieux ! Quatre boîtiers, autant d’objectifs, toutes nos pellicules déjà faites… Enfin, j’aperçois une forme sombre sur l’eau. Mon cœur fait un bond dans ma poitrine. C’est lui ! Il flotte nonchalamment sur la rivière. Le sac étanche a parfaitement rempli son double rôle de protection contre l’eau et de bouée.

Il est 1h ½ du matin, et nous avons retrouvé toutes nos affaires. Toutes, sauf les gamelles et les provisions. Et maintenant ? L’eau monte t-elle encore ? Nous surveillons le niveau, et décidons qu’il est plus prudent de s’enfoncer plus avant sur la langue de sable. Puis, épuisés, nous tentons de dormir quelques heures.

 

Cette nuit restera comme l’une de mes plus grandes frayeurs. Rétrospectivement, nous avons eu beaucoup de chance. La chance d’abord d’avoir récupéré toutes nos affaires. Mais l’addition aurait pu être beaucoup plus salée. Si le courant avait été un peu plus violent, n’aurions nous pas, nous aussi, été emportés dans la rivière ?

 

Mardi 2 novembre

4h : j’ai réussi à somnoler un peu, mais la peur m’a fait me lever plusieurs fois pour contrôler le niveau de l’eau. La rivière a cessé de monter. Maintenant que le jour commence à percer, l’inquiétude s’estompe. Davelo se lève, et part à la recherche de ses gamelles. Peine perdue ! Nous ne nous éternisons pas ici. Pas de petit déjeuner ce matin, nous plions le camp le plus vite possible, comme pour fuir cet endroit. Peu à peu, les couleurs reviennent sur la rivière, et notre moral remonte. Le temps se dégage, et nous faisons une halte dans un bras d’eau translucide qui vient se mêler aux eaux rouge du cours principal. Une occasion de se débarrasser de cette gange rouge qui nous recouvre le corps depuis 2 jours. Quel plaisir ! Seul Davelo ne goûte aucun plaisir : il n’a pas eu de riz ce matin, et cette situation l’angoisse : pour un malgache, ne pas manger de riz 3 fois par jour est synonyme de danger mortel !

13h: nous arrivons en vue de l’embarcadère de Bekopaka. Quelle joie ! Nous imaginons déjà un lit, une douche (enfin, un seau d’eau)… Mais renseignement pris au bureau des guides, il n’y a pas d’hôtel. La saison tire à sa fin, les hôtels sont fermés. Il ne reste que la possibilité du camping. En effet, un camping est installé au bord de la rivière (un peu en hauteur !), à l’ombre des manguiers. En temps normal, nous aurions campé avec bonheur, mais aujourd’hui, l’idée ne nous réjouit guère. Tous nos vêtements sont mouillés. La tente est trempée et pleine de boue… Peut-être aura-t-elle le temps de sécher au soleil avant la nuit ?

A peine la tente est-elle montée qu’un orage, tout aussi violent que celui de la veille, éclate. Rebelote ! Nous seulement, nous revoici trempés, mais en plus nous risquons de nous faire assommer par les mangues qui nous tombent violemment dessus. C’est dans ces circonstances que le Club Med apparaît comme une alternative tout à fait réjouissante à nos vacances ! L’orage se calme. C’est décidé, nous ne passerons pas une seconde nuit blanche sous la tente. Retour au bureau des guides. Ces derniers devinent, au son légèrement hystérique de ma voix, que nous devons trouver un hébergement. Peut-être au village, mais rien n’est sûr. Qu’à cela ne tienne, tout plutôt que la tente ! En 15 minutes, nous prélevons un échantillon de nos affaires. Le plus gros restera cette nuit au camping, sous notre tente inondée. Puis sac sur le dos, nous suivons les guides. Le village n’est pas loin : 2,5 km. Mais la piste est un vrai champ de boue. Dans l’état où nous sommes, cela fait peu de différence, et c’est avec le plus grand détachement que nous plongeons nos chaussures dans les ornières gadoueuses, sous le regard étonné de nos accompagnateurs. Enfin le village ! Le premier arrêt est le bon : un ex-député possède deux chambres d’hôte libres. La patronne regarde d’un air compatissant les deux statues de boue que nous sommes devenus, et nous demande d’un ton légèrement amusé : « vous prendrez une douche ? ». Un toit, un lit, un saut d’eau, un morceau de savon, quel bonheur ! Et 2 merveilleux steacks servis avec des frites ! Un véritable rêve. C’est avec beaucoup de peine que nous finissons notre repas, et tombons immédiatement endormis alors que, déjà, un nouvel orage gronde au loin.

 

Mercredi 3 novembre

Dix heures de sommeil ; il fallait bien ça ! Aujourd’hui, pour nous remettre de nos émotions, nous avons décidé de ne rien faire. Enfin, rien à part retourner au camping, récupérer nos affaires, récurer la tente, faite sécher nos vêtements, inventorier ce qui est perdu… le tout avant l’orage de l’après-midi. Maintenant, on a bien compris le truc : beau temps jusqu’à 15h, déluge ensuite !

Arrivés au camping, soulagement : la tente est encore là, elle a résisté tant bien que mal aux orages de la nuit et aux chutes de mangues. Nous passons la matinée à inventorier nos affaires, sous l’œil amusé des gamins : vêtements, pharmacie, chaussures, matériel de camping, peu à peu nous étalons autour de nous une sorte d’inventaire à la Prévert. Heureusement, le soleil est impitoyable, et les affaires sèchent vite !

Nous aurons juste le temps d’empaqueter nos affaires et de rejoindre le village avant l’orage de l’après-midi. Ca devient un rituel !

 

Un petit mot sur notre hôtel. Jamais au cours d’un voyage à Mada, nous n’aurons été servis comme ici ! Evidement, nous sommes les seuls clients, ça aide ! Un garçon plein de bonne volonté est à notre disposition permanente pour répondre à la moindre de nos demandes… et même souvent à celles que nous ne formulons pas ! C’est ainsi qu’il débarque à tout bout de champ dans notre chambre pour apporter une nouvelle bougie, un tortillon anti-moustiques, une boite d’allumettes, une serviette de bain, nos vêtements qui ont été lavés (et repassés !)… ça finit par être un peu lassant. Je me demande toujours ce qu’il a pensé la première fois en voyant sur la table de notre chambre, bien étalés pour les faire sécher, des dizaines de billets de 50.000 FMG (au total, c’est ainsi plus de 6.000.000 FMG que nous avons ainsi étalés…). Pour les repas, même cérémonial. Nous sommes servis avec style. Même les cure-dents nous sont apportés sur un plateau ! Du jamais vu.

Cela étant, la communication est loin d’être évidente, nos hôtes ne parlant le français que de manière très limitée. Nos menus du soir en sont la meilleure illustration. Le premier soir, nous avons eu droit à 2 magnifiques steacks avec frites. Une fois rassasiés, nous avons vu arriver un énorme plat de spaghettis. Le garçon a eu l’air très étonné quand nous lui avons dit que nous n’avions plus faim, mais s’est vengé en nous apportant en dessert deux belles bananes à la confiture pour chacun. Le lendemain, nous lui expliquons que le repas était excellent, mais trop copieux. « Pas de pâtes ce soir », lui explique t-on. Le soir arrivé, le voici avec deux pizzas pour chacun. Elles sont au thon et René lui explique qu’il ne mange pas de poisson, mais que ce n’est pas grave, parce que nous soupçonnons qu’un autre plat suit. Peine perdue, il revient 5 minutes plus tard avec 2 autres pizzas au fromage ! Suivent alors des boulettes de poulet, des frites, et nos fameuses bananes à la confiture… Diantre, ils ont peut-être décidé de nous engraisser pour nous manger ? Le lendemain, nous tentons une autre tactique. « Juste un steack pour ce soir ». Que voit-on arriver au dîner ? Et bien exactement que ce nous avions demandé, à savoir… un seul steack que nous devrons nous partager ! Comme quoi, la communication, c’est un art !

  

Jeudi 4 novembre

Aujourd’hui, rendus prudents par les orages diluviens à répétitions, nous avons pris rendez-vous à 7h du matin pour un petit tour « découverte » des Tsingy. C’est un circuit qui n’excède pas 3/4h dans la partie la plus accessible des Tsingy, à 2 pas du camping. Ca commence fort, simplement pour rejoindre le bureau des guides à l’entrée du parc, situé à 3 km du village. Trois jours de pluie ont transformé la piste en un immense champ de boue où même les grands camions 4x4 peinent à passer. En réalité, nous imitons les malgaches qui marchent dans les prés le long de la piste. C’est moins boueux… mais beaucoup plus épineux, aïe !

Notre guide, Tahina, nous attend à l’entrée du parc. C’est un garçon charmant qui parle très bien français et qui, dès le commencement, comprend notre attente et le rapport particulier que nous entretenons avec la photo. Lui-même photographe amateur, il n’aura de cesse pendant les 3 jours qui suivent, de nous montrer la faune, la flore, les concrétions de pierre sous le meilleur angle visuel possible. Une perle !

Les Tsingy correspondent à un ancien massif corallien émergé qui a été sculpté pendant des dizaines de milliers d’années par les pluies tropicales. Ils ont maintenant l’aspect d’un immense massif rocheux, perdu au milieu de la forêt, parcouru de failles plus ou moins larges, et dont le sommet a pris la forme de milliers d’aiguilles de pierre acérées. Les Tsingy de Bemaraha constituent un site unique au monde et ont été classés patrimoine de l’humanité par l’Unesco.

Ce matin, nous ne voyons que les petits Tsingy, qui n’excèdent pas une trentaine de mètres de hauteur. Mais aussi limité soit-il, ce petit circuit nous convainc qu’il faut absolument aller voir les grands Tsingy. On aurait souffert tout ça pour ne pas voir le principal ?

Ce qui nous fait hésiter, c’est la pluie évidemment. Aller faire les grands Tsingy, cela signifie partir 3 jours, faire une marche d’approche de 17 km dans la boue, camper deux nuits… Malgré tout, l’aventure nous tente. Tahina nous explique qu’un campement est organisé au pied des Tsingy, avec des grottes qui permettent de s’abriter en cas de pluie. Alors c’est décidé, nous partirons demain matin, laissant la majorité de nos affaires à l’abri à l’hôtel.

 

Vendredi 5 – Samedi 6 – Dimanche 7 novembre

Miracle, il n’a pas plu cette nuit ! Nous nous surprenons à espérer quelques jours d’accalmie. Nous partons de bon matin pour le campement vers les Tsingy. La boue sèche lentement, et colle à nos chaussures. Bientôt, c’est 2 kilos de terre que nous traînons à chaque pied, épuisant ! Mais plus nous progressons, nous éloignant peu à peu de la rivière, plus il paraît évident que la pluie a été moins abondante vers la forêt. Un bon signe !

Nous arrivons fatigués mais heureux au campement vers midi. Les arbres abritent des emplacements pour les tentes, alors que des foyers et des tables en pierre sont installés plus en hauteur sous les grottes. Le tout est simple, parfaitement intégré dans le paysage et superbement fonctionnel. On se croirait chez les Pierrafeux ! Après un repas et une sieste bien mérités, nous allons admirer le coucher de soleil au sommet de Tsingy. Magnifique ! Ici, le massif atteint une centaine de mètre de hauteur, et l’équipement avec baudrier est obligatoire pour en faire l’ascension. A nos pieds, 150.000 hectares de pointes de pierre prennent tour à tour toutes les couleurs de la fin du jour. Les appareils photo crépitent… Une petite toilette dans la rivière clôt ce 1er jour sans pluie depuis nos aventures sur la rivière. Les dieux sont avec nous. Quelque soit le temps demain, nous aurons savouré cette journée !

 

Après une nuit paisible, ponctuée par d’innombrables bruits de la forêt, nous nous réveillons tôt pour admirer le lever de soleil sur les pointes. Puis départ vers le grand circuit des Tsingy, situé à une heure de marche du campement.

 

Comment exprimer l’aspect grandiose et majestueux des grands Tsingy ? Le spectacle nous émerveille tout simplement. Sur ce circuit, l’équipement des voies nous permet alternativement de monter au sommet des pointes rocheuses, puis de descendre au cœur des failles, de passer sous les grottes. Jamais nous ne réussirons à imprimer ce spectacle sur pellicule ! Comment rendre l’ambiance, faire ressortir le grain de la roche ? Le défi est immense ! Nous n’hésitons pas à enchaîner les pellicules, persuadés qu’un grand nombre de photos n’arriveront pas à transcrire cette atmosphère si particulière. Ici, le grand angle est roi : 24 mm et 17 mm font merveille pour photographier pics et failles sous tous les angles.

 

Nous rentrons au campement en début d’après-midi, fatigués mais remplis de bonheur ! Nous savons déjà que, quelque soit l’aspect que prendra la suite de notre voyage, cette visite des Tsingy nous aura marqué bien au-delà que ce que nous avions imaginé !

Au cours de notre sieste, une troupe de Lemur fulvu, très intrigués, vient jeter un coup d’œil à nos tentes. Bien à l’abri sur leurs hautes branches, ils commentent avec force claquements de langue, les habitudes de ces étranges hominidés qui se sont installés sur leur territoire.

 

Dans l’après-midi, nous retournons faire un dernier circuit dans les Tsingy, adieu à cette immense forêt impénétrable et intemporelle. L’heure est venue de refaire nos packetages et de retourner à Bekopaka.

© René Eulriet & Claire Lemontey  | info@photos-madagascar.fr